C’est une drôle d’expérience que d’aller dormir chez son thérapeute. A 90 euros la sieste, mieux vaut dormir chez soi.

Mais voilà, se reposer pour moi, c’est perdre son temps en n’étant pas productif. Et ça m’angoisse. Alors je tire sur la corde de la création, quitte à ce qu’elle craque

Après lui avoir exprimé mon épuisement, mon thérapeute m’a proposé de faire une sieste sur son canapé trop étroit, pendant qu’il restait sur son fauteuil à me regarder.

Au bout de quelques secondes, j’ai rouvert les yeux,  lui demandant s’il ne préférait pas aller se faire cuire un œuf, ou envoyer des emails, pendant que j’essayais de me reposer, histoire au moins de ne pas lui faire perdre son temps, pendant que je perdais le mien.

Il a tenu à rester présent.

Je suis retourné sceptique, à ma tentative de sieste.

Et quand l’agitation dans mon cerveau s’est calmée, les larmes ont pris la relève.

Me souvenant d’un sentiment perdu depuis l’enfance, rassurant comme une présence divine.

On veille sur moi.

 

Je suis là, tu peux te reposer,
aucun tigre ne viendra te manger,
aucun serpent te mordre
aucun démon te prendre
Je veille sur toi
Dors sur tes deux oreilles.

Dormir sur ses deux oreilles, à moins d’avoir été façonné par Picasso, demande une certaine flexibilité.

Et puis comment savoir s’il tiendra sa promesse, et qu’il ne t’abandonnera pas pendant ton sommeil, parce que tu proutes ou ronfles trop fort ?

Et puis la méfiance s’est estompée.

Et je me suis laissé aller, jusqu’à retrouver cette plénitude de l’enfant dont la mère veille, berçant d’un doux chant son sommeil. 

J’ai repensé à cette gravure de la Vierge Marie sur la tombe de ma mère,et à cette phrase entendue lors d’un cercle d’écriture : ce désir d’un dieu qui me parle à travers les lumières des feuillages.

Si mon thérapeute s’était levé à cet instant, me laissant là, j’aurais continué à me sentir en sécurité. Ce n’était donc pas lui qui créait ce sentiment, mais moi, en lui attribuant le pouvoir de me protéger.

Alors, si je le voulais, si je le croyais aussi, je pourrais donc retrouver ce sentiment qu’il y a quelqu’un qui veille sur moi.

Mais qui ?

Mes morts chéris, des fantômes, l’esprit d’un dieu bienveillant, ou mes proches encore vivants ?

Les gens qui t’aiment savent être là quand tu vis un drame. Mais quand ton moment de gloire est terminé, ils retournent à leur quotidien, et te laissent alors seul avec ta peine. Et tu n’oses plus les déranger, conscient qu’ils ont aussi leurs problèmes

Qui donc alors veille sur toi ?

Si tu ne le sais pas, ferme les yeux, et demande-toi, qui dans ce monde, ou dans l’autre, saura protéger ton sommeil.

Fais la liste de toutes celles et ceux que tu peux appeler pour leur poser cette étrange question :

– Salut, est ce que je peux venir dormir chez toi cet après-midi ?

Et si tu te retrouves allongé  sur le canapé de ton thérapeute, c’est que tu auras su demander de l’aide, et accepter du soutien.

Alors tu sauras qu’il y a quelqu’un d’autre que ton thérapeute qui veille sur toi.

Si cet article t’a plu, abonne-toi à mon blog

2 réponses

Répondre

Se joindre à la discussion ?
Vous êtes libre de contribuer !

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *