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Mon année zéro à moi, n’a pas commencé à la mort du Christ,

mais à la tienne.

Il s’en est passé des choses dans la vie depuis que tu es partie.

 

Le jour de ton enterrement, papa a beaucoup pleuré.

Moi pas. J’étais trop occupé à filmer.

Papa a continué à arroser tes plantes dans l’appartement de Boulogne,

mais elles sont toutes mortes d’un coup.


On a eu un chat.
Les enfants l’ont appelé Berlioz.

Comme dans les aristochats.

 

Nermine a déménagé à Bordeaux avec Christophe et Thomas
Elle a continué à rendre visite à papa toutes les semaines.

 

J’ai fait plusieurs jours de tournage avec lui.
J’ai voulu filmer ton absence et cette vie qui continuait sans toi.

Le citronnier que tu m’avais offert n’a pas survécu à l’hiver.

Dans notre jardin, on a planté un olivier, un pommier

et un mirabellier.

 

Papa a vieilli.

Une fois, en sortant de l’appartement,

il est tombé dans la rue.

Je me suis formé à l’hypnose.

 

Un matin au réveil, après t’avoir vue en songe,

j’ai eu envie de te téléphoner,

et j’ai réalisé que tu n’étais plus là.

 

J’ai commencé à recevoir mes premiers clients.

Mélanie et moi, on s’est mariés

et on est allé vivre une année en Égypte, avec les enfants.

Joachim s’est mis au hip hop et au karaté, Mathilde au cheval

J’ai découvert la méditation et le qi gonq.

 

Ta sœur Nabila est morte d’un cancer, à 71 ans.

Comme toi. Comme ta grande sœur Feriel.

J’ai lancé mes premiers stages d’écriture

et décidé d’arrêter le cinéma.

 

Avec Mélanie, nous nous sommes fâchés, puis réconciliés.

Elle est partie faire un stage de développement personnel.

Il a fait beau. Il a plu.

Et il a fait beau à nouveau.

 

Joachim a eu pas mal de bobos,Il s’est ouvert 3 fois le menton.

La France a changé de président.

Elle a gagné la coupe du monde de football.

L’Égypte a gardé le même président.

Plus personne là-bas n’a reparlé de la révolution. 

 

Nous sommes rentrés en France

Je suis devenu formateur en hypnose.

J’ai pris des cours de chant

Mathilde a fait des crises impressionnantes, et on n’a pas su comment les gérer.

 

Papa a oublié ses clefs dans la maison.

Des serruriers lui ont fait payer 2500 euros.

J’ai continué à me rendre en Egypte

Les arbres du jardin ont donné leurs premiers fruits.

 

Nermine a changé de métier. Ses passages chez papa se sont raréfiés

J’ai pris l’habitude de te rendre visite au cimetière

Après avoir encore perdu l’équilibre, papa a arrêté d’aller à la gym.

 

J’ai décidé de reprendre le scénario que j’avais commencé au lendemain de ta mort

avec l’aide de Camille, ma productrice, et Sonia, ma coscénariste

Papa a eu une aide à domicile.

C’est devenu compliqué.

 

Le monde a été confiné pendant une année entière

à cause d’un virus appelé covid

J’ai lancé mes premiers programmes en ligne.

Joachim a commencé des cours d’arabe.

 

Papa est parti dans un Ehpad à Pantin.

Nermine l’a appelé tous les jours

J’ai commencé une thérapie.


Avec Sonia et Camille, on a fini l’écriture de 
« la vie Apres Siham »

Mathilde est entrée au collège, Joachim s’est mis à la guitare

Le Covid a emporté ta sœur Enayat.

Je la croyais immortelle, et ne pensais pas

que ses appels incessants me manqueraient un jour

Je suis retourné au village. J’y ai trouvé notre maison déserte

et me suis demandé en pleurant si j’y retournerais encore.

 

J’ai créé un blog personnel

j’ai publié tous les jours pendant des mois

 

Après un énième refus des commissions,

j’ai décidé de laisser tomber « la vie apres Siham »

Mélanie et moi nous sommes séparés.

Je suis allé habiter dans l’appartement de Boulogne.

je m’y suis senti seul et orphelin.

 

Dans sa maison de retraite, papa a perdu progressivement la mémoire.

Il a eu de plus en plus de mal à marcher.

J’ai continué à lui rendre visite et à profiter de nos moments partagés.

Le divorce a été prononcé.

 

J’ai racheté la maison de Pantin.  

Les enfants ont découvert la garde alternée.

Il y a eu des jours de pluie, des jours de soleil

et d’autres jours de pluie.

 

J’ai  repris le tournage du film commencé au lendemain de ta mort

Je suis retourné filmer papa.

Même si je sais que bientôt il partira, et qu’aucun film ne le retiendra.

 

J’avais commencé à le filmer par peur de le perdre

J’ai voulu contrôler le temps en l’immortalisant

Depuis, j’ai appris que filmer pouvait aussi être un moyen d’aimer

ceux que la vie nous a donné la chance de rencontrer,

et ça vaut bien une résurrection.

 

Voilà ce qu’il s’est passée dans ma vie

Depuis cette année zéro, où tu es partie

Ça ne fait pas beaucoup de changements à l’échelle de l’humanité,

où il continue à faire beau, à pleuvoir,

et à faire beau à nouveau.

 

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– Un jour nous rentrerons en Égypte.  

Cette phrase je l’ai longtemps entendue pendant mon enfance.

La France était pour mes parents une résidence provisoire, dans l’attente du retour à la Terre Promise, celle que mes parents chérissaient plus que tout.

Depuis, les années ont passé. J’ai eu mon bac, fini mes études, mon père est parti à la retraite.

Mais il n’y a pas eu de retour en Égypte.

On a enterré ma mère en France, à des milliers de kilomètres de son village natal.

Et mon père est resté seul dans son appartement de Boulogne Billancourt.

Un an après la mort de ma mère, avec ma sœur nous lui avons proposé de faire un voyage en Égypte, dans l’espoir de l’aider à sortir de sa dépression.

Sentant que ce voyage serait peut-être son dernier dans son pays d’origine, on a voulu lui offrir un beau moment de partage.

L’Égypte ne ressemblait plus au pays que mon père avait connu et aimé autrefois. Entre temps, j’avais construit mes propres liens et relations, et  je me réjouissais de lui faire découvrir mon Egypte, lui présenter mes amis, et le guider dans des lieux qu’il ne connaissait peut-être pas.

Comme pour lui dire que la relève était assurée.

Et qu’à ma manière, j’étais resté fidèle à son désir.

Nous avons passé quelques jours agréables, même si je sentais que cela coutait à mon père de sortir de son chagrin et de sa solitude pour rencontrer mes amis, ou de nouveaux lieux.

Un matin, je lui ai proposé de m’emmener dans un endroit qui avait compté pour lui. Comme un rituel pour dire au revoir à cette terre qu’il ne reverrait sans doute plus, et partager avec lui un bout de son Égypte.  

Il m’a répondu par un haussement d’épaules. Tout cela n’avait désormais plus d’importance pour lui. J’ai eu un pincement au cœur, mélange de frustration, de tristesse, et d’agacement. Puis  acceptant mon impuissance, j’ai laissé tomber l’idée et nous nous sommes allés  nous promener dans les rues du centre ville, en compagnie de ma tante Enayat et mon cousin Antonios.

Je ne me souviens plus très bien comment nous nous sommes retrouvés dans le jardin de l’Ezbekieh, sur la place de l’opéra.

C’était un rêve de voir surgir cet improbable jardin, quasi-désert, en plein cœur de la capitale, dans un quartier urbain, bruyant et pollué.

Nous nous sommes posés sur un banc, pour profiter du vent, du calme et du chant des oiseaux. Les bruits de la circulation étaient étouffés par les feuilles des arbres.

Il y avait de la grâce et de la magie dans ce mysterieux moment que la vie nous offrait.

– Je connais ce banc. J’ai dormi dessus il y a 52 ans.

La voix de mon père était calme et apaisée.

Et il a commencé son récit.

Il venait de sortir de prison, après 5 ans dans les camps de Nasser. Et n’avait pas d’endroit ou dormir.  

Ses cousins au Caire, qui devaient l’héberger, faisaient semblant d’être absents quand il allait sonner chez eux.

Alors, la nuit, il errait sans argent ni destination, avec pour seul compagnon son paquet de cigarette.

En prison, malgré la souffrance, ils étaient un collectif et cela leur donnait la force, mais là, à sa sortie, il se retrouvait isolé, démuni,  dans une société qui ne voulait pas de lui.

Un matin, épuisé a bout, il est arrivé devant ce  banc, dans le jardin jardins de l’Ezbekiya, espérant s’y allonger et dormir un peu.

Ce même banc sur lequel nous nous retrouvions aujourd’hui.

A l’époque, un policier s’était alors approché de lui

POLICIER
Qu’est- ce que tu fais ? Dors pas là, tu risques de te faire voler tes affaires.

WAGUIH
Qu’est ce qu’on pourrait me voler ? Je n’ai rien.

POLICIER
On pourrai te piquer tes vêtements. Ne dors pas ! Allez lève-toi, et bouge d’ici.

Mon père s’est tourné vers moi

WAGUIH
Même dormir ne m’était pas permis.

J’ai eu les larmes aux yeux en écoutant mon père se raconter, et livrer pudiquement sa détresse.

Par quel étrange hasard nous étions nous retrouvés sur ce même banc qui le ramenait à ce qui fut pour lui l’un des pires moments de sa vie.

NAMIR
Papa, à quoi il rêvait, cet homme de 29 ans qui voulait dormir sur ce banc ?

WAGUIH
Avoir un travail. Une maison. Et trouver à manger.

NAMIR
Pourquoi trouver un travail ?

WAGUIH
Pour exister. On ne peut pas exister sans travail.

NAMIR
Si tu pouvais t’adresser à cet homme de 29 ans, qui vient de se faire chasser de ce banc, t’aimerais lui dire quoi  ?

WAGUIH
Sois volontaire. Fais des efforts. C’est ce qui va te permettre de t’en sortir.

NAMIR
Et imagine que tu puisse raconter à ce Waguih de 29 ans, tout ce qu’il va réussir à faire, dans les 50 prochaines années de sa vie, et ce qu’il va devenir, comment il réagirait ? 

WAGUIH
Il me dirait : tu en as enduré des choses. Tu as beaucoup porté. Grâce te soit rendue.

Nous sommes restés quelques instants sur ce banc, en silence.

Un jour, avec mon père nous sommes retournés en Égypte.

Et assis sur un banc, nous avons honoré la trajectoire d’un homme d’efforts et de volonté, salué la terre promise, avant de nous en retourner chez nous. 

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Novembre 2011.

Ma mère, mon père et moi sommes au Qatar, entourés d’une centaine de spectateurs.

Dans quelques instants, va démarrer la première projection publique de « La Vierge, les Coptes et moi ». C’est mon premier long-métrage, il concourt dans la compétition officielle du festival de Doha.

Et ma mère en est le personnage central.

Elle ignore encore que le film contient des scènes tournées à son insu dans lesquelles on la voit me hurler dessus, m’insulter, m’interdisant de me rendre au village pour filmer notre famille, et me menacer même d’un procès si jamais je ne lui obéis pas.

Pour la préparer au mieux à la découverte du film, et endormir ses éventuelles résistances, je m’étais assuré que le festival l’accueillerait dans les meilleures conditions : voyage en 1ere classe, hôtel 5 étoiles, voiture avec chauffeur, et surtout je voulais qu’elle découvre le film dans une salle de cinéma, en présence d’un vrai public et d’un jury de professionnels.

Même si j’appréhendais les réactions de ma mère, j’étais confiant, et heureux de lui offrir ce cadeau.

Dès les premières minutes, des rires ont fusé dans le public.

Quand le personnage de ma mère est apparu sur l’écran, toute la salle hurlait de rire.

J’ai guetté discrètement les réactions de ma mère. Elle restait silencieuse.

Puis à la fin de la projection, lorsque les lumières se sont rallumées, elle s’est tournée vers moi.

-Tu t’es bien foutu de moi.

Ses yeux brillaient.

– Comme tu ne m’as fait signer aucun contrat, je vais te réclamer un maximum de royalties. Parce que la vraie star de ton film, c’est moi.

Et nous avons rigolé.

La suite a été un conte de fée.

Standing ovation. Grand Prix du Jury.

Et une pluie de récompenses et de critiques positives s’ensuivit.

J’avais rarement vu ma mère aussi heureuse.

L’aventure du film nous avait rapproché. Jamais nous n’avions été aussi complices.

Ma mère était heureuse de la réussite de mon film, et qu’il me donne enfin accès à une vraie reconnaissance professionnelle, après tant d’années de galères.

A cela s’ajoutait sa satisfaction d’être devenue l’héroïne d’un film, de recevoir plein d’éloges, et de messages d’admiration de la part du public.

Après être allée en Égypte défendre le film, elle s’apprêtait à devenir l’ambassadrice du film dans le monde entier.
Après cette consécration, la perspective d’un avenir joyeux s’ouvrait devant nous.

C’était sans compter sur ces imprévus dont la vie a le secret, nous rappelant toujours quand nous croyons l’avoir oublié, que nous nous ne sommes pas les auteurs du scénario que nous croyons écrire.

Une visite médicale pour des douleurs à l’oreille. Des examens. Et la découverte d’un cancer de la langue, en phase 3.

Trop tard pour faire de la radiothérapie. Il ne restait plus que la chimio.

Les festivals et les chaines de radio réclamaient ma mère.

Ne pouvant se rendre aux invitations, à cause de son traitement, je la filmais parfois dans des vidéos que le public était heureux de découvrir.

Certains ironisaient sur le film, qui selon eux, aurait du s’appeler : « la Vierge, ma mère et moi »

Dans cette période d’euphorie et d’enthousiasme, ma mère a commencé à se rêver actrice, exprimant son désir de participer à mes prochains projets. Et moi, porté par cet élan créatif, et minimisant les inquiétudes concernant son état de santé, j’avais évoqué en riant l’idée de développer un nouveau film avec elle.

J’ai commencé à écrire une comédie égyptienne que je pensais finir rapidement.

Mon désir était simple : Faire rire ma mère le jour de la projection.

Mais la maladie a avancé plus vite que mon écriture.

Face à mes angoisses d’auteur incapable de terminer mon scénario, se rajoutait désormais la peur que ma mère ne puisse pas découvrir ce nouveau film.

J’ai changé de cap plusieurs fois, développé plusieurs idées de comédies.

Jusqu’au moment ou j’ai compris que ce ne serait plus possible.

Je n’y arriverai pas.

 

Ma mère était désormais en soins palliatifs, épuisée, a bout de forces, après quatre années de combat.

Elle si joyeuse et bavarde, n’arrivait plus à parler distinctement.

Et moi, j’étais toujours empêtré dans mes histoires, et mes scénarios sans fin.

Un jour, puisant dans ses dernières ressources, elle m’a fait cette demande :

– Namir, je veux qu’on projette notre film, à l’hôpital, pour le personnel.

Je me suis jeté sur cette mission. Plusieurs infirmières ont accepté la proposition avec enthousiasme, et nous avons alors calé une date pour cette ultime projection.

Le jour venu, aucune infirmière n’était disponible, toutes accaparées par les imprévus et les impératifs de l’hôpital. Et la séance s’est transformée en projection privée.

Mon père, ma sœur, un couple d’amis, et moi, entourions ma mère, partageant avec elle un moment plein de vitalité et de jubilation dans sa dernière demeure.

Ma mère a revu une dernière fois, à travers cet écran qui sépare les mondes d’hier et d’aujourd’hui, le village de son enfance, ses sœurs, sa mère décédée deux ans plus tôt, le tout ponctué par nos commentaires joyeux.

Malgré sa faiblesse et son épuisement, elle a souri, avant de s’endormir heureuse et apaisée.

Je suis rentré chez moi ce soir là avec un sentiment d’accomplissement.

Quelque chose me disait que si ma mère mourait cette nuit là, elle partirait dans la joie d’un vrai moment d’amour partagé. 

J’ai réalisé à quel point j’avais eu la chance de pouvoir faire ce film avec elle. Et qu’à travers cette projection, je lui avais peut-être renvoyé tout l’amour et l’énergie qu’elle m’avait donner, en m’aidant à faire ce film, malgré son attitude en apparence hostile.

La boucle était bouclée.

Et puis est arrivé l’appel fatidique.

J’avais beau m’y attendre, tout s’est emballé.

J’ai eu un dernier sursaut.

Le souvenir de cette promesse faite à ma mère.

Faire un nouveau film ensemble.

Alors, comme pour conjurer le sort, et repousser les frontières du chaos, j’ai rappelé mon équipe. Et je les ai convaincus de venir filmer les funérailles.

Ce n’était pas forcément ce scénario là que j’avais prévu d’écrire, mais je voulais me convaincre que de là ou elle était, ma mère assisterait à la projection de ce nouveau film.

Et que peut-être même, j’arriverais encore à la faire rire.

J’ignorais encore où cette improbable aventure allait me mener.

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Dans la famille de ma mère, il y avait 4 sœurs : Feriel, Siham, Nabila et Enayat.

Feriel, l’aînée est morte en 2013. Dans son agonie, elle a attendu que ma mère retourne au village avant de s’éteindre. C’était un moment très mystérieux dont je parle dans cet article.

Deux ans plus tard, en 2015 ce fut le tour de Siham, ma mère.

En 2017, je me suis rendu au village au chevet de ma tante Nabila. Elle venait d’avoir 71 ans.

Toutes trois étaient morte d’un cancer à 71 ans.

Lorsque ma tante Enayat m’a dit qu’elle avait 69 ans, je n’ai pas pu m’empêcher de lui faire cette blague stupide.

– Ah, cool. Il te reste encore 2 ans…

Elle m’a insulté. On s’est marrés. Et puis voilà.

J’ai jamais trop compris pourquoi je supportais pas ma tante Enayat à mon adolescence. Pourtant elle était ma nourrice. C’est elle qui m’avait élevée les deux premières années de ma vie, lorsque ma mère m’avait confiée à elle, alors que je n’avais encore qu’un mois.

Peut-être que je lui en voulais de m’avoir rendu à mes parents, à l’âge de deux ans, et de me faire revivre le sentiment d’abandon. Avec toute la violence de la séparation, et la confusion que cela a du engendrer dans mon esprit d’enfant de voir réapparaitre des parents que je croyais disparus a jamais.

Après la mort de ma mère en 2015,  devant mon incapacité à accepter son décès, je me suis demandé si je n’étais pas en train de rejouer le scénario de cet enfant de 2 ans, qui a fini par croire que même disparue, sa mère pouvait encore revenir.

Mais non, les mamans ne reviennent plus.

Avec le temps, mes relations avec Enayat se sont beaucoup améliorées. Désormais, on parlait régulièrement. Et nous avions prévu de tourner ensemble plusieurs séquences de mon nouveau film.

C’est par téléphone, un matin d’hiver 2022, que j’ai appris son décès.

Un covid mal diagnostiqué, une insuffisance respiratoire non prise en charge par le médecin du village, un transport dans un hôpital public de Sohag dénué d’appareils à oxygène. Et c’est en quarantaine, dans la solitude d’une chambre d’hôpital, qu’Enayat s’est éteinte, sans qu’aucun membre de sa famille n’ait eu le droit de lui rendre visite.

C’était comme un mauvais rêve.

 

– Papa, pourquoi ça te rend si triste la mort d’Enayat ?  Tu la voyais à peine une fois par an.

– Mais je savais qu’elle était là, et que je pouvais l’appeler.

– Et bien, tu n’as qu’a faire comme si tu ne savais pas qu’elle était morte. Ça change pas grand-chose à ton quotidien en fait.

Difficile d’expliquer la mort à une enfant, alors qu’on ne la comprend pas toujours bien soi-même.

Dans mon enfance, les morts, c’était surtout des lettres venues d’Égypte qui annonçaient le décès de gens dont j’oubliais aussitôt l’existence, pour retourner à mes jeux et à mes lectures.

Ce n’est qu’au début de ma cinquième décennie que j’ai réellement éprouvé physiquement le sens de la mort, et de ce que signifiait vivre la perte.

J’ai hésité à retourner au village, et faire face à cette terrible réalité.

J’ai retrouvé la maison familiale vide.

Et  j’ai pleuré le perte d’Enayat qui me laissait désormais orphelin. Elle que je voyais si peu et qui avait pourtant joué, sans que je m’en rende compte,  un rôle si fondateur dans ma vie.

Elle que je croyais sans doute éternelle.

Mais elle aussi ne reviendra plus.

– Promets nous que tu reviendras, Namir. Tu es chez toi, ici, ne l’oublie pas. Même si plus personne n’habite dans la maison, on la nettoiera régulièrement pour que tu puisses y venir. Tu nous le promets ?

J’ai promis, voulant sans doute y croire. Puis j’ai dit au revoir à la maison familiale, à mes cousins,  et à ce passé dont il ne resterait bientôt plus de trace, hormis dans ma mémoire vieillissante.

A l’approche de mes cinquante ans, je me sentais rentrer dans un hiver sans fin, qui a emporté avec lui toutes mes figures maternelles.

C’était sans compter sur le printemps qui frissonne toujours dans la profondeur de nos larmes.

Je me suis souvenu que j’en étais la preuve vivante. Il parait que c’est en cherchant à consoler ma mère de la perte de son grand-père, que mes parents m’ont conçu. Tu peux en savoir plus ici.

Retrouver les habitants du village, pleurer dans leurs bras, visiter les champs, évoquer ma tante,  et dire au revoir à la maison m’avaient fait énormément de bien.

Cette  nuit, j’ai fait un rêve.w

Au petit matin, j’ai demandé à mes cousins d’acheter quatre arbres fruitiers.

Un figuier, un goyavier, un manguier et un citronnier

Pour Feriel, Siham, Nabila et Enayat.

Mes cousins m’ont prévenu.

– Des fruitiers ? Mais les gosses du village vont voler tous tes fruits

Je m’en fichais totalement. A vrai dire, j’étais même content de savoir que ces fruits de nos larmes nourriraient d’autres vies, et que la mémoire de nos morts rendrait des enfants heureux.

Alors, nous avons mis nos mains dans la terre, et nous avons creusé ensemble.

Et en guise de sépulture, nous avons planté quatre arbustes dans les champs.

Cet été avec mes enfants, nous retournerons au village.

Nous verrons bien s’ils ont donné des fruits.

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Et jette un oeil à ces deux articles là :

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– Nico, j’ai besoin de toi pour filmer l’enterrement de ma mère.

– T’es sérieux ?

– J’ai besoin d’avoir ces images. Je ne sais pas encore pourquoi mais je veux pas louper ce moment.

-C’est un peu…. indécent non ?

– Bah on filme bien les mariages. Je vois pas pourquoi on filmerait pas les enterrements ?

– C’est un moment de recueillement. Même si les gens donnent leur accord, je serai mal à l’aise pour les filmer.

-Et puis, j’ai très envie de venir à l’enterrement Namir. Mais pas comme cameraman. J’aimais vraiment ta maman. C’est quel jour d’ailleurs ?

– Lundi. Le 2 mars. C’est vraiment important pour moi de filmer Nico.

Nicolas consulte son agenda.

– Aie, je suis en tournage. Je pourrais pas être là. Et c’est une grosse interview. Impossible à décaler.

Nous restons quelques instants en silence.

– Je peux te dire un truc ?

– Ouais, bien sur…

– J’ai l’impression que t’essayes de retenir ta maman. Comme si filmer les gens pouvait les empêche de mourir. Mais elle n’est plus là, Namir

– Qu’est ce que t’en sais. Peut-être que c’est elle qui attend qu’on la filme. Et qu’en nous voyant en train d’essayer de la filmer, elle va d’abord se mettre en colère, mais qu’au fond ça va la faire marrer….

Nicolas m’écoute, triste. Nous nous disons au revoir.

***********

– Allo, Namir ? Euh…. C’est incroyable. Le tournage de l’interview vient d’être reporté d’un jour.

– Tu vas pouvoir venir ?

– Oui.

– Tu vois, même mortes, les mères ont encore le pouvoir de faire annuler des tournages.

Nicolas est venu aux funérailles.

Et il a tout filmé.

L’effondrement de mon père, le chagrin de mon fils, le désarroi de ma sœur, l’amour et la solidarité des uns et des autres, les liturgies, les discours, mes tentatives de faire rire avec mes prises de paroles décalées, les audios que j’ai diffusés, et puis le soleil, larmes et le vent qui faisait danser nos cheveux au cimetière.

En partant, nous nous sommes dit que si Siham était présente à son enterrement ce jour là, elle aurait surement rigolé.

Nous avions filmé de très belles scènes.

Il n’y avait qu’un seul absent à ce spectacle.

Et ce n’était pas ma mère. Mais je ne l’ai su que bien quelques années plus tard.

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Il est 7h30 quand je suis réveillé par l’appel de ma sœur.

On est le mercredi 25 février. Et ça y est, c’est fini.

Machinalement, je m’habille et je sors.

De ce trajet, je n’ai aucun souvenir. Ni du métro, ni de la rue, ni du temps qu’il fait ce jour là, ni même du nom de ce centre de soins palliatifs du 15ème arrondissement.

Je me revois dans l’ascenseur.

Mon premier réflexe est d’allumer la caméra de mon téléphone portable. Je filme ma main qui appuie sur le bouton du 2ème étage, pendant que les portes de l’ascenseur se ferment.

D’ailleurs, est ce que je m’en souviens vraiment ? Ou est-ce le film qui s’en rappelle pour moi ?

La caméra est ma confidente. A ses côtés, je me sens moins seul. Elle garde les traces de cette réalité qui glisse sur moi.

Une des dernière fois où j’ai vu ma mère, elle n’avait plus la force d’articuler. J’avais continué mes blagues, même si elles ne la faisaient plus rire.

On avait trouvé le moyen de communiquer grâce à une feuille sur laquelle elle pointait de sa main tremblante les lettres de l’alphabet. Chaque mouvement lui demandait un effort considérable.

Son dernier message avait été clair :

R.E.S.T.E.A.V.E.C.M.O.I

J’avais préféré m’éclipser.

Je me présente au stand des infirmières. L’une d’elle me reconnaît, confuse.

L’avant-veille, je devais rendre visite à ma mère et d’y emmener Mathilde, ma fille de 5 ans. J’en en avais tellement pas envie que j’avais appelé le centre, espérant qu’ils me déchargent de ma culpabilité en m’autorisant à retarder ma visite. Comme s’ils avaient les moyens de savoir quand ma mère allait mourir.

L’infirmière, ce jour-là avait été très rassurante.

– Nous sentons quand les gens arrivent à leur dernier souffle. Et ce n’est pas le cas de votre mère. Donc rassurez-vous. Vous pouvez sans problème reporter votre visite à plus tard. 

J’ai acquiescé, soulagé.

– Alors, je peux venir jeudi ?

– Oui, pas de soucis. Jeudi, c’est très bien.

Et me voilà ce mercredi, dans le couloir, face à cette même infirmière. D’un filet de voix, elle se confond en excuses, ne comprenant pas comment l’état de ma mère a pu se détériorer si rapidement dans la nuit. Elle se sent coupable. Je la rassure.

La chambre de ma mère est au bout du couloir.

Cette fois, derrière cette porte que j’ai ouverte plusieurs fois, ma mère n’est plus là.

Les infirmières ont pris soin de faire sa toilette, et de lui fermer les yeux.

Son corps est allongé dans ce lit.

Mais elle n’est plus là.

Avant, parfois, je bouchais le nez de ma mère pendant son sommeil, pour qu’elle réagisse et s’énerve. Ça me faisait rire. Devant elle, à nouveau, presque inquiet, j’approche une main timide de son visage, et refais ce geste.

Je touche craintivement sa peau froide, lui pince le nez.

Elle ne réagit pas.

C’est violent le silence d’un corps sans âme.

Où est ma mère ?

Et moi, je suis face à quoi.

Ce corps gisant, propre, habillé, inerte, est-ce encore ma mère ?

L’infirmière me rassure. Ma mère est morte en paix.

Je ne peux m’empêcher de penser à ce moment où elle n’a plus réussi à respirer, à cause de sa langue qui avait trop gonflé.

Je l’imagine à bout de forces, en train d’étouffer en silence.

Elle est morte seule dans sa chambre, asphyxiée.

Et je n’étais pas là.

 

Avant de quitter la chambre, je ressors mon téléphone. Et je prends une photo de sa main.

Puis une autre, d’elle allongée, prise à travers l’encadrement de la porte.

Comme si tout cela était un film, une pièce de théâtre, ou un mauvais rêve dont je mettrai des années à comprendre qu’il s’appelle réalité.

Je suis dans mon lit. Il est 7h30. Et le téléphone ne va pas sonner. Rien de tout cela ne va arriver.

A l’heure où j’écris ces lignes, huit ans ont passés.

Une part de moi est morte ce mercredi 25 février. Et elle ne ressuscitera pas.

C’est ainsi qu’a commencé ma vie d’après.

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Dans cet article, j’aborde un protocole assez particulier : le deuil d’un évènement qui n’a pas encore eu lieu. Et comment cela peut-être libérateur.

 

Depuis la mort de mère, il y a deux ans, mon père vit seul avec sa souffrance, errant dans un appartement désormais trop grand, rempli de souvenirs et de bibelots.

Et mes visites régulières pour le sortir de sa prison mentale relèvent plus d’un effort douloureux que d’un réel désir d’être avec lui. Surtout quand je traîne avec moi ma femme et mes enfants.

Et je rentre chez moi, triste de le quitter ainsi, triste de voir son état se dégrader, triste de ne plus réussir à passer de bons moments avec lui.

Et mon sentiment d’impuissance grandit, visite après visite.

Le jour de l’anniversaire de ma fille, nous avions prévu une sortie en famille.

Mon père n’avait pas la force, ni l’envie de nous rejoindre. Ma femme, me voyant affecté, a alors suggéré que nous passions fêter l’anniversaire chez lui, pensant que ça lui ferait du bien.

Ma femme a renoncé à notre soirée prévue. Nous avons faits quelques courses pour un repas festif, prévenu mon père, et pris la route.

On a trouvé mon père apathique. Il nous a accueilli dans un jogging discutable, n’avait rien préparé pour l’anniversaire. Après avoir joué deux minutes avec les enfants, il est retourné s’assoir sur son fauteuil, à côté de sa radio, puis est parti regarder la télévision dans sa chambre.

On s’est ennuyés. Les enfants ont été pénibles. Et sur le retour, ça a été l’explosion.

Embouteillages. Bloqués  deux heures sur le périphérique, les enfants qui se bagarrent, ma femme qui s’énerve et moi qui hurle. Nous étions tous en colère les uns contre les autres. Ma femme contre moi pour les avoir trainés dans cette soirée pourrie. Moi contre ma femme parce qu’elle rejetait la responsabilité de cette soirée, et de ces embouteillages sur moi. Et nous deux contre les enfants qui faisaient du bruit.

Une fois rentré à la maison, tendu et exténué, j’ai eu envie d’appeler mon père, juste pour  le réveiller et lui dire qu’on venait de passer deux heures dans les transports, que le retour s’était très mal passé, et que j’étais furieux qu’il n’ait fait aucun effort pour nous accueillir, et qu’il n’ait même pas été reconnaissant qu’on soit venus le voir.

Quelques jours, plus tard, un collègue me reçoit pour une séance d’hypnose. Et nous travaillons  sur le deuil. Il me demande alors quel deuil est important pour moi de faire en ce moment.

J’ai perdu ma mère deux ans plus tôt. Mais ce deuil me semble fait. Je  ferme les yeux, et laisse venir à mon esprit la première image qui se présente.

C’est celle de mon père.

Une partie de moi se dit que c’est bizarre de faire le deuil d’un vivant. Mais mon esprit ne vit peut-être pas dans le présent. Parfois, j’ai l’impression qu’il est comme une version de moi, plus lointaine, qui a déjà vécu tout ce que j’ai vécu, et qui me le redonne à vivre.

Une fois mis sous hypnose, j’emprunte donc le chemin du futur.

Je me retrouve dans un endroit calme. Entouré de gens. Il pleut. C’est un cimetière. C’est le jour de l’enterrement de mon père.

Je suis à la fois conscient que je suis dans une séance d’hypnose, et en même temps, présent dans le souvenir, en train de vivre cette situation.

C’est un peu comme un rêve nuageux, chargé d’émotions. La voix du thérapeute me guide. Le rêve se précise, et la sensation de réalité se fait plus forte dans le cimetière.

Je suis maintenant devant la tombe de mon père. Je fais un discours.

Il a trouvé le temps long, Waguih. Mais il est en paix maintenant, aux cotés de sa femme.

Des larmes coulent sur mes joues. Je suis  triste, et pourtant soulagé. Je sais qu’il attendait ce moment depuis longtemps. Mais l’émotion est là, lourde. L’eau coule. Et là,  je perçois mon père, paisiblement allongé aux côtés de ma mère, dans le cercueil. A sa place. Enfin tranquille.

Ses yeux sont fermés. On dirait qu’il dort. Je sens qu’il  me voit pleurer sur sa tombe. Calmement,  il s’adresse à moi.

– Tu sais, je n’attendais rien de toi, Namir.

Sur le coup, je ne comprends pas la phrase. Mais elle traverse mon corps, comme une décharge.

– Je n’attendais rien de toi.

Et soudain, c’est comme une prise de conscience.

Je n’ai jamais demandé à mon père ce qu’il attendait de moi. Je me disais que mon rôle de fils c’était de l’aider à vivre sa fin de vie. Et là, il me disait simplement qu’il n’attendait rien de moi. Sans jugement, ni culpabilisation.
J’ai voulu imposer à mon père d’aller mieux. Il ne voulait pas.  Je le forçais. Lui résistait. Ça me frustrait.

Ce qu’il voulait, il me l’avait déjà dit plein de fois. Et je n’avais pas voulu l’entendre.

Mes lèvres se sont mises à bouger toutes seules. Et je me suis entendu prononcer cette phrase :

– Le meilleur moyen d’aider quelqu’un qui ne veut pas d’aide, c’est de ne pas l’aider.

C’est avec ces mots que je suis revenu au présent. Me demandant même si on ne pouvait pas remplacer « aider » par « aimer », dans la phrase.

Mon sentiment d’impuissance avait fondu.

Je venais de faire le deuil de mon désir de guérir mon père.

Il me restait à profiter du temps qu’il lui restait à vivre.

Depuis, je vais voir mon père uniquement quand j’ai envie de partager quelque chose avec lui. Et si lui n’a pas envie de partager, tant pis. Je sais pourquoi je le fais.

J’ai arrêté de lui parler de lui. Et plutôt que de commencer mes discussions par : « bonjour Papa, comment ça va ? », je commence par lui parler de ce que j’ai fait, vécu, ressenti. Ce que je ne faisais pas beaucoup avant. J’ai commencé à lui parler de mes doutes, de mes questionnements, de l’hypnose. Il s’est ouvert. Comme si finalement ça le soulageait qu’on ne lui parle pas de lui. Son attention était ailleurs. Il ne devenait plus un vieil homme qui souffrait, mais un père qui écoutait son fils se livrer à lui.

Et ses résistances se sont atténuées. C’est comme si notre relation jusque-là avait eu la forme d’un duel inconscient, une rivalité dans laquelle, chacun voulait se montrer plus fort que l’autre. Et j’avais contribué à alimenter ce rapport.

La relation était plus apaisée. Et c’est comme si, dans cet apaisement, il y avait enfin de la place pour un dialogue.

Alors, je lui ai raconté cette drôle de séance que j’avais faite, et comment je l’avais enterré.

Il m’a écouté silencieusement.

– Tu auras envie que je dise quelque chose de particulier à ton enterrement, Papa ?

– Tu pourras dire : il s’est battu jusque bout, il a affronté jusqu’à la dernière minute.

– Affronté quoi ?

– La vie.

Bien des fois, mon éducation avait été nourrie par ces mots. Se battre, affronter, lutter, résister. Mon père a vécu sa vie comme un combat, dans lequel la réussite c’était comme arracher quelque chose. Mais à qui ?

 – Dieu, merci, j’ai fait ce que j’avais à faire.

– Qu’est ce que t’as fait ?

– J’ai pu construire une situation, vous élever,  ta sœur et toi, et vous permettre d’être autonomes. Dieu merci, aujourd’hui je sais que c’est fait.

-Alors, tu as fait TOUT ce que tu avais a faire ?

– Il ne me reste plus rien à faire.

-Donc tu peux mourir.

-J’aimerais bien.

– Qu’est ce qui t’en empêche du coup ?

-Ah.. ça… c’est encore la vie

-Elle t’embête la vie ?

– Beaucoup

– Elle t’embête jusqu’au bout. Elle ne veut même pas que tu meures. Juste pour te donner une occasion supplémentaire de te battre contre elle.

Mon père a haussé les épaules. On a souri.

Parfois, la meilleure manière d’aider quelqu’un qui ne veut pas, c’est de ne pas chercher à l’aider.